La francisation de la toponymie bretonne s’intensifie sous pression de l’Etat français, l’association Koun Breizh se mobilise

Les pélicans et les albatros n’ont pas encore fait leur apparition dans l’Hexagone. Ces oiseaux donnent pourtant leurs noms à plusieurs rues en Bretagne. Ces choix fantaisistes ne font pas vraiment rire l’association Koun Breizh, mémoire de Bretagne, qui dénonce une tendance de fond inquiétante : la francisation des campagnes. De moins en moins de noms de rue sont en breton. Cela s’est accentué avec l’application de la loi 3DS (votée en février 2022) qui impose à toutes les communes de dénommer les voies et les lieux-dits, et de donner un numéro à chaque usager.

À ce jour, en France, 1,6 million de foyers ne disposent pas d’adresse précise. Les communes ont jusqu’au 1er juin pour se mettre en règle et la Bretagne n’est pas la région la plus à la traîne. Il y a néanmoins fort à faire, car l’habitat y est particulièrement dispersé avec beaucoup de lieux-dits et hameaux. Selon la direction du groupe La Poste en Bretagne, « les enjeux relatifs à l’adressage sont nombreux : permettre l’intervention rapide des services d’urgence, garantir l’acheminement des lettres et des colis, les services à domicile, assurer la navigation GPS et accéder au déploiement de la fibre ».

« Les Bretons ont perdu la connaissance de leur langue »

À Baden, dans le Morbihan, toutes les voies n’ont pas encore été baptisées. « On essaye de faire ça au fur et à mesure, mais ça prend du temps », justifie Yannick Le Helley, adjoint au maire. Ce mardi, Jean-Claude Le Ruyet, écrivain et membre de l’association Koun Breizh, est venu l’alerter sur les risques de standardisation des adresses au détriment de la langue bretonne. D’ailleurs, afin d’en débattre, Koun Breizh et Bretagne Majeure organisent une conférence sur la toponymie bretonne en danger le 1er juin à Vannes.

« Quand des lotissements se construisent, l’aménageur suggère souvent des noms. Sinon, ce sont les habitants qui proposent des noms de fleurs, d’îles, d’oiseaux mais pas beaucoup de breton », concède Yannick Le Helley. Le choix définitif revient au conseil municipal. « Les Bretons ont perdu la connaissance de leur langue », se désespère Jean-Claude Le Ruyet. Selon Koun Breizh, les communes qui appliquent la loi, en lien avec La Poste, adoptent souvent des noms français pour les nouvelles voies, ce qui conduit à la disparition des lieux-dits en langue régionale. Le danger serait tel que l’association a demandé récemment l’inscription en urgence des lieux-dits bretons au Patrimoine immatériel de l’Unesco.

Déjà, en 2019, plusieurs associations et artistes bretons s’étaient émus de cette francisation. Une manifestation avait été organisée à Telgruc-sur-Mer (Finistère). Depuis, l’Office de la langue bretonne accompagne les communes qui souhaitent préserver la toponymie historique. La Poste, qui propose aux communes un service d’aide à la dénomination et numérotation des voies, explique que, si « les langues régionales peuvent s’intégrer dans le nom de la voie, le type de voie doit être en français », la langue de la République étant le français. Un avis qui ne fait pas l’unanimité.

Source : Le Parisien

 

By La rédaction

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