Dans un article confus non dépourvu de mégalomanie, Alan le Cloarec, agitateur au sein du petit groupe d’ultra-gauche « Douar ha Frankiz » – dont un des sympathisants s’est illustré en blessant gravement un cadre de l’association Bretagne Réunie le 12 octobre, à Nantes – tente de dénaturer l’identité politique du Parti National Breton. Il importe de faire une critique de ce texte d’une réelle faiblesse intellectuelle et de mettre par contrecoup en lumière la nature de l’action du Parti National Breton.
L’antienne du régionalisme de gauche est connue : qui n’est d’obédience marxiste ou à tout le moins de gauche, ne saurait être breton. « C’est un groupuscule d’extrême droite qui cherche à se légitimer en prenant un vernis breton, alors que ses idées sont à l’opposé de la Bretagne en général et du mouvement breton en particulier » écrit ainsi Cloarec.
Il suffisait d’y penser.
Ici, l’impudence le dispute à l’inculture. L’Emsav – qui n’est pas le « mouvement breton » – est une production historique qui découle de la contre-révolution bretonne. Il se structure politiquement dès le lendemain de la nuit du 4 août 1789 après l’annexion finale de la Bretagne par la France révolutionnaire et la dissolution de ses institutions nationales qui a suivi. L’Association Bretonne d’Armand La Rouërie sera la matrice qui accouchera au 19e siècle d’un mouvement culturel, linguistique et politique propre à la Bretagne : le régionalisme, contre-révolutionnaire et anti-républicain, d’extrême-droite pour reprendre un terme cher à la gauche hexagonale. Hersart de la Villemarqué, père du Barzaz Breiz, en fut une des plus illustres figures. Depuis lors, l’Emsav, comme mouvement historique d’opposition ethnique à l’assimilation poursuivie par l’état révolutionnaire français, s’oppose aux soubassements idéologiques de la gauche révolutionnaire française que sont l’égalité et l’universalisme. Avec l’apparition du Parti Nationaliste Breton en 1911, puis de Breiz Atao en 1919, ce mouvement régionaliste se transforma rapidement en mouvement nationaliste. La clarification idéologique finale eut lieu avec la formation du Parti National Breton, en 1932. Avec lui, la régression fédéraliste-régionaliste de gauche, inévitablement subordonnée aux idées de 1789, fut écartée et l’Emsav put se structurer résolument en mouvement ethno-étatiste.
Ainsi, quand Cloarec écrit du Parti National Breton qu’il « cherche à se légitimer en prenant un vernis breton alors que ses idées sont à l’opposé de la Bretagne en général et du mouvement bretonen particulier », il commet un contresens historique et projette sur le PNB la nature de son propre petit groupe marxiste « Douar ha Frankiz ». Remettons les choses à l’endroit par contrecoup au sujet de ce dernier : « C’est un groupuscule d’extrême gauche qui cherche à se légitimer en prenant un vernis breton, alors que ses idées sont à l’opposé de la Bretagne en général et du mouvement breton en particulier ». Tout s’éclaire soudain et l’on comprend que par son agitation et sa vive hostilité à l’égard de Bretons déterminés à s’opposer à l’immigration de masse, phase ultime du projet d’assimilation poursuivi par l’État français contre le peuple breton, Cloarec, élément aliéné de la société française, répète stupidement les mots d’ordre de la gauche révolutionnaire hexagonale qui depuis deux siècles veut araser la personnalité ethnique de la Bretagne.
Cloarec ne maîtrise pas la généalogie la plus élémentaire de l’Emsav, réalité encore démontrée un peu plus loin dans un passage bien plus dense de malhonnêteté. On lit : « Même la référence qu’ils prennent au PNB est une vision tronquée de l’Histoire, basée non pas sur un héritage politique, mais sur le discours de la propagande française anti-bretonne. Le PNB historique avait en effet refusé, par deux fois, d’évoluer vers l’idéologie fasciste qu’Olier Mordrel voulait lui inculquer. Aux congrès de 1933 et de 1938, ses membres avaient clairement voté contre des propositions allant dans ce sens et pendant la guerre, les nationalistes qui rejoignaient la Bezen Perrot le faisaient en désobéissant aux consignes du parti. S’ils franchissaient le pas, ils étaient automatiquement exclus du PNB. L’abbé Perrot lui-même, don le nom fut récupéré par l’extrême droite après sa mort, condamnait sans réserve les positions d’Olier Mordrel et de Célestin Lainé, ainsi que leurs liens avec les Nazis, qu’il considérait comme des partisans du paganisme, donc des hérétiques. »
Le Parti National Breton (1932-1944) n’aurait jamais été fasciste, partant le PNB du 21e siècle, en formulant lui-même un programme fasciste, dénaturerait ce qu’il était en s’en revendiquant. Cela ferait système avec les caricatures de l’auteur Françoise Morvan et ainsi les deux faces de la même médaille française (« propagande française anti-bretonne ») se ligueraient consciemment ou inconsciemment contre « la Bretagne ». Tel est le postulat de Cloarec.
Premièrement, le Parti National Breton contemporain ne se revendique pas plus particulièrement du PNB de 1932 que de celui de 1911 : il se revendique de l’Emsav au sens large. Ensuite, Cloarec serait bien en peine de trouver ou que ce soit dans le programme du Parti National Breton la moindre intention exprimée d’être un parti « fasciste » ou de vouloir un état breton « fasciste ». Dans son texte d’orientation « Demain, l’État breton », le Parti National Breton déclare vouloir une organisation interne fédérative inspirée… de la Suisse! Les systèmes fascistes étant centralisés et pyramidaux, cela suffit à démontrer l’inanité des divagations de Cloarec. Encore faut-il se donner la peine de lire les textes officiels présents sur le site du mouvement.
Mais puisque Cloarec évoque le PNB de l’entre-deux-guerres pour étayer son propos, sa tentative d’opposer Olier Mordrel au PNB sur la question du « fascisme » suffit à démontrer le manque de sérieux de notre prosateur.
En fuite en Allemagne en 1939, Olier Mordrel était accompagné de Fransez Debeauvais, âme de Breiz Atao et chef incontesté du PNB et du mouvement nationaliste au sens large. Leur action conjointe à Berlin culmina avec la proclamation du Comité National Breton, à Pontivy, le 3 juillet 1940. Leur recherche de l’appui allemand contre la France au nom du PNB n’était pas seulement opportuniste, mais le fruit de l’évolution historique logique de deux mouvement nationaux qui, depuis la révolution française, s’étaient structurés contre elle. Fransez Debeauvais l’affirmera explicitement au printemps 1944, peu avant sa mort. L’audace de Cloarec est telle qu’il va jusqu’à invoquer l’abbé Perrot contre Célestin Lainé et Olier Mordrel, citant l’abbé à comparaître comme témoin antifasciste dans son procès contre le Parti National Breton du 21e siècle. Les désaccords philosophiques entre ces personnes n’ont jamais prévenu les rapports cordiaux, ni même les amitiés, et que jamais leurs options respectives dans ces domaines ne les ont divisés dans leur lutte politique commune contre l’État français. Relevons surtout que Cloarec se garde bien de citer qui a assassiné l’abbé : les bandes antifascistes du Parti Communiste, ancêtres de ses « amis » antifas français qui appellent aujourd’hui à la violence contre le PNB. Cette réécriture de l’histoire par Cloarec pour tenter de faire passer le PNB de Debeauvais pour un mouvement antifasciste et antinazi est si absurde que l’on se demande qui peut le prendre au sérieux.
S’attardant sur notre programme, Cloarec ne fait pas preuve de plus finesse : « Toutes les insanités proférées par la direction de ce groupuscule sur les réseaux se retrouvent en version plus ou moins policée dans le programme du Parti National Breton. Pour eux, l’avenir de la Bretagne est une Corée du nord version IIIème Reich. Un mur sera construit à la frontière, le droit sera celui du sang, les élections n’existeront plus, la peine de mort sera rétablie, la répression sera omniprésente, le nucléaire sera développé à tout crin, il n’y aura pas d’impôt sur le revenu pour que la bourgeoisie s’y trouve tout de même à son aise et les enfants seront endoctrinés dès l’enfance dans un équivalent des jeunesses hitlériennes. Oh ! et naturellement, l’avortement sera interdit et entraînera une peine de mort automatique par pendaison. »
Nulle part le Parti National Breton ne propose « d’interdire les élections » comme Cloarec le dit par ailleurs dans son texte. Poursuivant l’instruction de son procès politique en « fascisme », il dénonce vivement le droit du sang comme base de la nationalité bretonne qui figure dans le programme du PNB. Ce droit du sang est en vigueur dans les démocraties d’Europe centrale et orientale et il est conforme à l’héritage de l’Emsav, mouvement ethno-nationaliste depuis sa fondation. Rappelons par exemple que le mouvement artistique des Seiz Breur stipulait que, pour y adhérer, ses membres devaient être « de sang breton ». Quiconque parcourt le programme du PNB ne trouvera aucune mention d’une quelconque « répression omniprésente ». Le lecteur aura également des difficultés à trouver le lien logique que fait Cloarec entre le choix du nucléaire civil (dont la Bretagne tire déjà 90% de sa consommation d’électricité), la fin de l’impôt sur le revenu et la « Corée du Nord version Troisième Reich ». Loin du Juche nord-coréen, le Parti National Breton souhaite que les travailleurs bretons conservent le fruit de leur labeur en lieu et place de l’État, ce qui est, il est vrai, très éloigné des thèses marxistes dont est friand Cloarec, mais aussi du socialisme d’état français dont il a finalement l’air d’apprécier le caractère.
Cloarec cite aussi comme preuve de la culpabilité « fasciste » du PNB l’instauration de la peine de mort que son programme défend, omettant de dire que des états démocratiques comme les États-Unis, le Japon ou Singapour l’appliquent. Pour clore son hasardeuse démonstration, Cloarec souligne l’intention du PNB d’abolir l’avortement. La démocratie polonaise l’a interdit en 2020, ce qui ne fait pas de ce pays un état « fasciste », pour autant que l’on sache. Par cohérence, l’avortement étant un homicide, celui qui s’en rendrait coupable en le pratiquant volontairement sur une femme serait légalement passible de la peine capitale. Sur cette question, le PNB s’engage pour enrayer la catastrophique chute démographique qui frappe notre peuple et qui le précipite à l’abîme. Avec une moyenne d’âge de 44 ans, la Bretagne ne fait plus suffisamment d’enfants pour se maintenir, mais subit en plus une terrible émigration constante de l’ordre de 10,000 départs nets et définitifs chaque année. Ajoutés aux 10,000 avortements annuels, ce sont 20,000 Bretons tous les ans que la Bretagne perd. Dans le même temps, le même nombre d’étrangers, français ou extra-Européens, vient coloniser la Bretagne. Quel parti national pourrait fermer les yeux sur ce cataclysme qui représente l’équivalent des pertes de la première guerre mondiale tous les dix ans et menace l’existence même de la nation bretonne ? Le PNB, comme parti responsable face à l’histoire de son peuple, porte un projet de régénération nationale et il le fera peu importe les hurlements de la bourgeoisie en place dont Cloarec, comme contradiction exprimée par un Breton écrasé par un surmoi de gauche d’importation française, n’est qu’un perroquet doublé d’un flic.
Enfin, Cloarec conclut en déclarant : « Les idées d’indépendance et d’autonomie pour la Bretagne défendent des valeurs politiques, morales et humaines qui n’ont rien à voir avec celles de l’extrême droite. C’est le devoir des nationalistes d’aujourd’hui et de demain de faire en sorte que cela perdure. »
Cette nouvelle projection de Cloarec, fruit du contresens historique déjà évoqué plus haut qui voit des Bretons aliénés par la francisation amalgamer les thèses de Rousseau avec l’Emsav, doit être remis à l’endroit : « Les idées d’indépendance et d’autonomie pour la Bretagne défendent des valeurs politiques, morales et humaines qui n’ont rien à voir avec celles de l’extrême gauche. C’est le devoir des nationalistes d’aujourd’hui et de demain de faire en sorte que cela perdure. »
En résumé, la définition de la Bretagne dont Cloarec prétend avoir le monopole dans ce texte n’est que la somme des indignations de la gauche bourgeoise et régressive qui domine l’espace médiatique hexagonal, rien de plus. Nous sommes clairs : cette définition de gauche de la Bretagne, définition étrangère car française par construction, est incompatible avec l’essence de la Bretagne, avec sa nationalité et avec ce qu’est l’Emsav comme processus historique résolument antagonistes aux thèses de 1789. Le Parti National Breton est décidé à engager une révolution complète des sensibilités, par étapes, pour que la conscience bretonne du 21e siècle, qui sera inévitablement marquée par de graves bouleversements et la fin du mythe du progrès et de l’égalité, se reconfigure autour des thèses centrales du nationalisme breton. De cette conscience bretonne nouvelle naîtra l’État breton lui-même et cet état, par évidence, sera le dépassement des résultats de 1789 et de 1945 en Bretagne.
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