Né le 17 octobre 1253 au manoir de Kermartin, près de Landreger (Tréguier), Erwan Heloury est issu d’une famille noble locale. Son père, Heloury Kermartin, est seigneur du Trégor, et sa mère, Azo Kelleneg, vient d’une lignée bretonne bien établie. À cette époque, la Bretagne est un État indépendant, un duché souverain avec ses propres ducs, lois et institutions. Le Trégor fait partie de ce pays où la langue bretonne est parlée partout, et où les gens vivent selon des coutumes anciennes.
Son éducation commence à Landreger, une ville importante pour l’Église bretonne. Cette cité abrite une cathédrale dédiée à Sant Tugdual, un des sept saints fondateurs qui ont christianisé la Bretagne au Ve siècle. Ces figures montrent comment la nation bretonne a répandu le christianisme tout en gardant ses racines culturelles celtiques. À Landreger, Erwan étudie le latin, la théologie et les bases du droit avec des clercs locaux. En 1267, à 14 ans, Erwan part pour Paris, sous le roi de France Louis IX. Erwan y suit les arts libéraux : grammaire, rhétorique, logique, arithmétique, géométrie, astronomie et musique. Ces études renforcent son sens critique, utile pour la justice plus tard.
En 1277, il va à Orléans pour étudier le droit civil et canonique. Orléans est connue pour ses écoles de droit, où des Bretons apprennent des lois qui peuvent s’appliquer dans leur État. Erwan maîtrise le Décret de Gratien, un texte clé du droit de l’Église, et le droit romain adapté aux coutumes locales. Il vit simplement, aide d’autres étudiants bretons pauvres et refuse les plaisirs de la vie étudiante. Pendant ces années, la Bretagne reste un duché puissant sous Jean Ier le Roux.
De retour en Bretagne vers 1280, Erwan est ordonné prêtre en 1284 par l’évêque Alain de Bruc à Landreger. Il choisit de rester dans son diocèse natal au lieu de chercher des postes ailleurs. En 1285, il devient recteur de Tredrez, une paroisse côtière du Trégor. Là, il vit parmi les pêcheurs et agriculteurs, prêche en breton pour être compris de tous. Il dénonce les abus des collecteurs d’impôts qui appauvrissent les locaux. La Bretagne affronte alors des tensions : le duché doit équilibrer ses relations diplomatiques avec la France et l’Angleterre, et les impôts pèsent sur le peuple.
Erwan distribue de la nourriture pendant les famines et aide les familles touchées par les épidémies. La même année, il est nommé official, c’est-à-dire juge ecclésiastique, pour le diocèse de Roazhon (Rennes). En 1292, il passe à celui de Landreger. Dans ce rôle, il juge des affaires touchant le mariage, les biens de l’Église et les disputes morales. Il défend toujours les pauvres : veuves, orphelins et paysans bretons contre les seigneurs puissants. Il plaide gratuitement, refusant l’argent des riches pour rester impartial. Ses décisions s’inspirent du droit breton coutumier, qui valorise la communauté sur l’individu. Par exemple, il intervient dans des cas où des nobles essaient de prendre des terres communes aux villages bretons.
Erwan réconcilie aussi des familles nobiliaires en conflit. Ses sermons en breton parlent de justice sociale, rappelant les vertus des saints bretons comme Sant Korentin ou Sant Paol, qui ont bâti l’État chrétien breton. En 1297, il démissionne de son poste d’official pour se retirer à Kermartin. Il continue à vivre pauvrement, donnant tout aux nécessiteux. Il étudie encore et aide les locaux dans des affaires simples. La Bretagne entre en crise avec la mort du duc Jean II en 1305, mais Erwan meurt avant, le 19 mai 1303, à 49 ans. Son enterrement à Landreger attire des milliers de Bretons, montrant sa popularité.
Après sa mort, son culte grandit vite. Dès 1303, des miracles sont rapportés : guérisons et protections pour les Bretons en mer ou à la guerre. En 1330, un procès de canonisation commence, basé sur des témoignages de compatriotes. Le pape Clément VI le canonise en 1347, le reconnaissant comme saint. Il devient patron des avocats et des Bretons opprimés. Aujourd’hui, Sant Erwan reste un emblème de la patrie bretonne. Sa fête le 19 mai au Pardon de Landreger est un lieu de pèlerinage national.
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