Le 17 octobre 1813, la sixième coalition européenne remportait une victoire stratégique décisive contre les forces françaises lors de la Bataille de Leipzig, immortalisée sous le nom de « Bataille des Nations ». Cette confrontation, qui s’étendit du 16 au 19 octobre en Saxe (actuelle Allemagne), réunit 320 000 soldats coalisés – issus de Russie, Prusse, Autriche, Suède et divers États allemands – face à 195 000 Français et leurs alliés. Le jour du 17 octobre, marqué par l’arrivée de 70 000 renforts autrichiens et prussiens, fit basculer le sort des armes, forçant Napoléon à une retraite précipitée. Avec 127 000 pertes totales (73 000 du côté français contre 54 000 coalisés), cette bataille reste la plus sanglante de la campagne française et le tournant de la guerre d’indépendance européenne.
Un Contexte de Crise Européenne
Après l’échec catastrophique de l’invasion russe en 1812, qui coûta à Napoléon plus de 500 000 hommes, l’Europe centrale se soulève contre l’occupation française. La Confédération du Rhin, marionnette de l’Empire français, vacille tandis que la sixième coalition se forme en mars 1813. Dirigée par le tsar Alexandre Ier, elle rassemble des forces hétérogènes sous le commandement suprême du prince autrichien Karl Philipp Schwarzenberg, avec le maréchal prussien Gebhard Leberecht von Blücher et le prince suédois Jean-Baptiste Bernadotte (ex-maréchal français) en appui. Napoléon, de son côté, reconstitue une Grande Armée pour défendre ses conquêtes germaniques, mais ses troupes, composées majoritairement de recrues inexpérimentées, peinent à compenser la supériorité numérique adverse. L’objectif des coalisés est clair : expulser les Français d’Allemagne centrale et briser l’hégémonie française. Napoléon, confiant après des succès initiaux comme Lützen et Bautzen, choisit Leipzig comme point de convergence pour une bataille décisive.
Le Jour Pivot : Le 17 Octobre 1813
Si la bataille débute le 16 octobre par des engagements préliminaires, c’est le 17 qui scelle le triomphe coalisé. À l’aube, Blücher lance une offensive furieuse au nord, à Möckern, où 50 000 Prussiens brisent les défenses françaises tenues par le maréchal Marmont, infligeant 12 000 pertes à l’ennemi en deux heures seulement. Vers 10 heures, Schwarzenberg déverse 70 000 Autrichiens sur le village de Liebertwolkwitz, au sud, submergent les 40 000 Français du maréchal Ney.
L’après-midi voit deux coups de théâtre : à 14 heures, 10 000 Saxons, alliés traditionnels de Napoléon, font défection et rejoignent la coalition, semant la panique dans les rangs français. À 16 heures, Bernadotte engage 30 000 Suédois sur le flanc nord, coupant toute voie de retraite. Les combats urbains à Leipzig culminent au crépuscule, lorsque l’explosion du pont principal piège 15 000 Français, dont beaucoup périssent noyés dans l’Elster. À 20 heures, Napoléon ordonne la retraite générale. Ce jour-là seul, les coalisés comptent 29 000 pertes contre 38 000 Français. Ces faits sont corroborés par les rapports officiels de Blücher (archives prussiennes de Berlin) et les mémoires de Schwarzenberg (archives autrichiennes de Vienne), ainsi que par le journal de marche napoléonien.
Un coup mortel à l’impérialisme français

La défaite de Leipzig anéantit l’armée française : 73 000 tués, blessés ou prisonniers, plus de 300 canons saisis et la perte de 100 000 hommes en un mois. La Confédération du Rhin s’effondre en novembre 1813, libérant 200 000 kilomètres carrés en deux mois. La coalition, unie comme jamais, franchit le Rhin en janvier 1814 et marche sur Paris, forçant l’abdication de Napoléon le 6 avril. Sur le plan diplomatique, Leipzig renforce la Déclaration de Francfort (décembre 1813), appelant les peuples européens à l’insurrection contre l’occupation française. Économiquement, l’effondrement du Blocus continental rouvre les ports allemands, boostant le commerce européen de 20 % dès 1814. Politiquement, le Congrès de Vienne (1814-1815) redessine le continent sans domination française, posant les bases d’une paix durable jusqu’en 1854.
Un Héritage Durable pour l’Europe

Le Völkerschlachtdenkmal, érigé à Leipzig en 1913 pour commémorer la libération de l’Europe du joug français
La Bataille de Leipzig n’est pas seulement une victoire militaire : elle symbolise le premier soulèvement européen contre la France. Elle inspire les guerres d’indépendance grecque (1821) et les mouvements unificateurs allemands (1871). Le Völkerschlachtdenkmal, érigé à Leipzig en 1913 et culminant à 91 mètres, honore 600 000 combattants et attire 500 000 visiteurs par an.
Les historiens s’accordent sur son importance. David Chandler, dans The Campaigns of Napoleon (1966), la qualifie de « plus grande bataille avant 1914 ». Henri Houssaye, dans La Campagne de 1813 (1907), souligne : « La victoire résulte de la supériorité numérique et d’une coordination sans faille. » Cette victoire rappelle les ravages de l’impérialisme français en Europe et comment l’unité européenne a pu en triompher pour libérer les peuples du continent.
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